Les vignobles du patrimoine mondial de l'Unesco

Inscrits au Patrimoine Mondial de l’Humanité, 11 vignobles européens racontent l’union de l’Histoire, d’un terroir et du talent humain. Cap sur Saint-Emilion, les maisons et coteaux champenois, les terrasses de Lavaux ou du Douro, les Climats de Bourgogne, l’île de Pico ou les collines du Prosecco…

1248 lieux et biens, culturels ou naturels, présentant une valeur universelle et un intérêt pour l’héritage commun sont inscrits au Patrimoine mondial de l’Humanité, un concept né en 1978 sous l’égide de l’Unesco. Fruits d’une synergie entre la nature et le travail de l’homme, symboles de paysages façonnés par les siècles, quelques vignobles répartis aux quatre coins du monde, en fait aux quatre coins de l’Europe, figurent sur cette liste d’exception qui racontent une certaine histoire du vin et de la viticulture.

11 vignobles dans le monde

Berceau de la viticulture, l’Europe abrite les 11 régions viticoles actuellement classées en tant que bien culturel au Patrimoine mondial de l’Unesco.

A l’est, la Vallée du Haut-Rhin moyen en Allemagne, le Paysage culturel de la Wachau en Autriche, les Vignobles en terrasses de Lavaux en Suisse, le Paysage culturel de la région viticole de Tokaj en Hongrie.

Au sud, le Paysage viticole du Piémont : Langhe-Roere et Monferrato, et les Collines du Prosecco de Conegliano et Valdobbiadene en Italie ou encore la Région viticole du Haut-Douro et le Paysage viticole de l’Ile de Pico au Portugal.

Et enfin, la France, pays du vin par excellence, tout chauvinisme mis à part, qui compte 3 régions viticoles classées : la Jurade de Saint-Emilion, les Coteaux, Maisons et Caves de Champagne et les Climats de Bourgogne.

Les Côtes du Rhône septentrionales, Sancerre, Cadillac et l’Alsace affichent également leur volonté d’obtenir, aux côtés des 54 autres sites français, naturels ou culturels, le précieux label. Précieux car la labellisation Unesco est synonyme de notoriété et d’attractivité – et donc de retombées économiques - et signe une vraie dynamique collective territoriale.

Saint-Emilion, le premier vignoble inscrit au Patrimoine Mondial de l'Unesco

Saint-Emilion a été le premier vignoble à être inscrit, en 1999 au Patrimoine Mondial de l’Humanité, en tant que “paysage culturel” et sur la base de deux critères :
1- La Juridiction de Saint-Emilion est un exemple remarquable d’un paysage viticole historique qui a survécu intact et est en activité jusqu’à nos jours
2- La Juridiction historique de Saint-Emilion illustre de manière exceptionnelle la culture intensive de la vigne à vin dans une région délimitée avec précision.

Le label Unesco reconnait et protège cette Juridiction de Saint-Emilion, qui regroupe 8 communes, et hérite d’une Histoire qui convoque Emilion, un moine breton devenu ermite, Jean Sans Terre, fils d’Aliénor d’Aquitaine, ou encore cette Jurade alors chargée de contrôler la qualité des vins locaux avant leur départ pour l’Angleterre.
Aujourd’hui, Saint-Emilion s’incarne par sa cité de charme et d’Histoire avec ses ruelles pavées, ses tours, son église monolithe, son cloître et ses belles adresses.

Mais aussi par ces vignobles soignés, parsemés de châteaux aux noms prestigieux, aux bâtisses élégantes ou aux chais classiques ou futuristes. 7800 hectares, 850 propriétés, plus de 100 kms de galeries souterraines de calcaire, anciennes carrières devenues chais de vieillissement ou champignonnières et 85 crus classés composent ce paysage culturel viticole qui émerveille autant que certaines cuvées issues de ce terroir d’exception.

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Coteaux, Maisons et Caves de Champagne : 10 ans d’Unesco et des siècles de bulles

En Champagne, terre de ce vin effervescent renommé dans le monde entier, la labellisation Unesco, obtenue en 2015, s’est concentrée sur 3 lieux emblématiques : les vignobles historiques d’Hautvillers à Aÿ et Mareuil-sur-Aÿ, la colline Saint-Nicaise à Reims et l’avenue de Champagne et le Fort Chabrol à Epernay.

Derrière ces trois lieux mythiques, se cache une ligne directrice, une verticalité qui conduit des vignobles en coteaux aux maisons de Champagne qui ont pignon sur rue en passant par les caves de production souterraines creusées dans la craie. “Ce triptyque Côteaux Maisons et Caves s’appuie sur un autre triptyque vertical, celui des paysages champenois, qui s’étagent entre forêt, coteaux et plaine. Cette lecture verticale de notre territoire et de la production de Champagne a été une des innovations du dossier de candidature tout comme celle d’engager toute l’aire d’appellation Champagne même si finalement trois zones cœur ont été retenues » souligne Séverine Couvreur, Présidente de la Mission Coteaux, Maisons et Caves de Champagne-Patrimoine mondial.

Aÿ, Reims, Epernay dans la Marne mais aussi l’Aube et l’Aisne incarnent cette diversité du et de la Champagne avec un travail collectif sur les hommes et les femmes - les grands noms et les ouvriers-, l’Histoire collective - celle des révoltes vigneronnes du siècle dernier ou des liens entre récoltants et négociants, celle des enjeux de demain – climatiques, économiques – mais aussi cet art de vivre à la champenoise et cet esprit de fête que véhiculent ces bulles incomparables. A l’image de la Route du Champagne en Fête qui a lieu tous les étés depuis 30 ans sur la Côte des Bar.

2025 a été marqué par de nombreuses célébrations de ces 10 ans d’inscription Unesco, dont l’idée est née en 2005 et qui valorise et protège une expertise, un paysage et un patrimoine uniques au monde. Une inscription qui, selon une étude récente, se traduit aussi par une notoriété accrue, des investissements et des retombées touristiques et économiques.

Les Climats du vignoble de Bourgogne : la consécration des clos

2015 a été un millésime faste pour la France avec l’inscription, en même temps que la Champagne, du vignoble bourguignon au Patrimoine Mondial de l’Humanité. Ici, ce sont les Climats de Bourgogne, ces parcelles de vignes situées sur les coteaux argilo-calcaires de la côte de Nuits et de la côte de Beaune qui sont sacralisées en tant que berceau et archétype de vignobles de terroir et de caractère.
C’est grâce notamment aux moines cisterciens et bénédictins qu’un parcellaire très précis a été minutieusement défini, aboutissant à 1247 Climats caractérisés d’un point de vue géologique, pédologique, hydrographique et atmosphérique et hiérarchisés dans le système des Appellations d'Origine contrôlée (AOC).

Parce qu’ils sont le produit d’un terroir naturel et de l’expérience humaine, ces Climats constituent un exemple unique et authentique de pratiques viti-vinicoles, préservées au fil de 2000 ans d’une Histoire qui se perpétue. Et se célèbre 10 ans après en 2025 avec une série d’évènements, notamment un colloque autour des connaissances sur les climats et des enjeux de demain mais aussi de grands projets pour l’adaptation au changement climatique et la préservation et la transmission de ce patrimoine. Et pour que ce modèle viticole des Climats, qui allie Chardonnay et Pinot noir à une parcelle souvent définie par un clos, perdure.

Piémont et Prosecco : 2 vignobles d’Histoire

Grand pays de vigne et de vin, l’Italie compte 2 vignobles classés au Patrimoine mondial :
- au nord-ouest, le Paysage viticole du Piémont : Langhe-Roero et Monferrato classé en 2014
- les Collines du Prosecco de Conegliano et Valdobbiadene au nord-est, inscrites en 2019.

Le premier, au sud du Piémont, englobe 5 vignobles et le Château de Cavour devenu un musée du vin. Le territoire est jugé unique car témoin des traditions viticoles d’hier et d’aujourd’hui, de l’interaction entre savoir-faire et environnement, et pour ses qualités esthétiques d’un paysage de vignes ponctué de villages, châteaux et chapelles. Y naissent quelques nectars prestigieux comme les rouges Barolo et Barbaresco ou encore les bulles d’Alta Langa.

Bulles toujours mais côté Venise et Dolomites en partant vers l’est et les collines du Prosecco de Conegliano et Valdobbiadene : ici, sur des flancs escarpés lignés de ciglioni, ces rangs de vignes parallèles ou perpendiculaires à la pente qui sculptent le paysage, nait le Prosecco DOCG (lien article AF Mai 2023), le plus côté. Nature et savoir-faire humain se conjuguent ici aussi pour créer un paysage unique et resté authentique.

Lavaux, un vignoble en terrasses de carte postale

Classé au Patrimoine Mondial en 2007, le vignoble de Lavaux, qui s’étend de Montreux à Lausanne sur la rive nord (et suisse) du Lac Léman, affiche ses vignes en terrasses plongeant dans le lac avec les Alpes en toile de fond. LA Carte postale !

En chiffres : 14 villages vignerons historiques, 400 kilomètres de murets, 10000 terrasses et quelques 900 ha protégés.
Héroïque par ses pentes, unique par ses trois soleils (avec celui se reflétant sur l’eau et la chaleur emmagasinée par les pierres), spécifique par l’omniprésence du cépage Chasselas, le vignoble de Lavaux mérite les superlatifs…

Pour l’Unesco, il représente un exemple remarquable d’interaction entre l’homme et son environnement au fil des siècles, mais aussi de préservation et d’adaptation : Lavaux, Vignoble en terrasse illustre en effet parfaitement cette passion viticole, initiée par les moines et perpétuée par les vignerons-tâcherons, cette volonté téméraire de créer et préserver des vignes sur ces coteaux escarpés et s’inscrit en tant que paysage culturel vivant évolutif.

Modelé initialement par le glacier du Rhône au Quaternaire, puis par l’Homme depuis le XII^ème siècle, sous l’influence aujourd’hui de l’érosion et de la pression immobilière, Lavaux (la vallée) est une mosaïque de micro-terroirs pentus alternant moraine, molasse, marne et grès, paré de terrasses structurées par des murets de pierre qui dessinent ce paysage spectaculaire et ponctué de jolis bourgs viticoles. Lutry, Cully, Grandvaux, Riex, Epesses, Rivaz ou encore Chardonne sont quelques-uns de ces villages et hameaux où la culture de la vigne est un art de vivre. Où le Chasselas, ce cépage révélateur de terroir déploie sa diversité sous l’appellation régionale AOC Lavaux et sous deux grands crus, Dézaley et Calamin. Et où la culture de la vigne a façonné depuis plus de 1000 ans un paysage grandiose et unique.

Les vignobles héroïques du Douro et de Pico

Autre vignoble grandiose, héroïque, en terrasses, celui de la région viticole du Haut-Douro, inscrit au Patrimoine mondial en 2001. Sur ces pentes abruptes qui serpentent au fil du tortueux Douro, s’écrivent quelques 2000 ans d’une Histoire viticole aussi tumultueuse que les flots d’une rivière longtemps indomptée.
Une Histoire qui convoque quelques grandes familles et figures locales, comme la vénérée Dona Antonia, mais aussi des négociants britanniques avisés et visionnaires et surtout une tradition locale qui a abouti à l’élaboration d’un vin doux naturel réputé : le Porto.

Remplissant 3 des critères Unesco - un paysage façonné par l’homme, des éléments patrimoniaux d’intérêt et une activité traditionnelle perpétuée et en évolution -, la vallée du Douro a fait évoluer ses paysages et sa viticulture au fil de différentes périodes et techniques culturales.

Sur ces montagnes de schiste, le paysage alterne les étroites terrasses socalcos étayées de murets de schiste construits à la main et les collines redessinées en paliers patamares d’aujourd’hui en passant par les vignes plantées dans le sens de la pente vinha ao alto, le tout égaillé de quintas blanches, jaunes ou roses. Des quintas souvent ouvertes à un œnotourisme authentique, des paysages magnifiques qui changent au fil des saisons et des vallées et des étapes sur la fameuse route 222, des vins, de Porto mais aussi des rouges et blancs secs sous appellation Douro : l’Unesco a classé un lieu d’Histoire viticole, qui se vit plus qu’il ne se raconte.

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Toujours au Portugal mais aux Açores, le Paysage viticole de l’île de Pico a été classé en 2004. Sur cette île volcanique au cœur de l’Atlantique, de longs murs de pierres noires ont été érigés pour protéger les enclos de vignes des embruns et des vents marins. Ces traditions viticoles anciennes qui remontent au XV^ème siècle ont façonné le paysage en une mosaïque de petits champs parsemée d’églises, maisons, caves viticoles et marquée par l’austérité des pierres noires et d’un climat rude.

Crédit photos : Alexandra Foissac

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