Le vin nature sans alcool : mythe ou réalité ?

S’il est bien 2 sujets qui créent des dissonances dans la filière vin, les voici réunis dans un même billet. Entre les fervents défenseurs du vin sans intrant et les inconditionnels du mouvement No/Low, un terrain d’entente est-il envisageable ? Un vin à la fois nature et sans alcool, est-ce compatible ?

Qui sont les adeptes du Vin méthode nature ?

Après 10 années de débats acharnés, la définition officielle, la charte d’encadrement et le protocole de contrôle du Vin méthode nature ont enfin vu le jour en 2020.

En résumé, il s’agit de vins issus de raisins biologiques, vendangés manuellement, fermentés à l’aide de levures indigènes, vinifiés sans intrants, sans techniques d’œnologie corrective et sans sulfites ajoutés avant et pendant les fermentations (un ajustement du SO2 reste toutefois autorisé avant la mise en bouteille).

Les adeptes de ces cuvées souhaitent laisser la nature s’exprimer librement. Mais c’est justement l’emploi du mot nature qui a suscité des débats : peut-on l’utiliser sans induire le consommateur en erreur ? Le raisin peut-il réellement se transformer en vin sans aucune intervention humaine ?

Les défenseurs de cette approche recherchent des vins de terroir, des vins qui expriment pleinement leur sol et leur climat, sans artifice. Mais faut-il s’abstenir d’intervenir au risque de voir apparaître des déviations organoleptiques qui gomment la typicité d’une parcelle ? Une intervention humaine raisonnée ne favoriserait-elle pas, au contraire, l’expression des terroirs et des cépages ?

Qui sont les partisans du vin sans alcool ?

Les vins désalcoolisés séduisent les consommateurs qui font la chasse aux calories, qui ne peuvent consommer d’alcool pour raisons de santé, ou qui n’en ont tout simplement pas envie.

Rappelons que, selon la législation, le vin est exclusivement la boisson résultant de la fermentation alcoolique complète ou partielle du raisin frais. Pour produire un vin sans alcool, il faut recourir à des procédés comme la nanofiltration, l’osmose inverse, les colonnes d’extraction à cônes rotatifs... De plus, ces techniques nécessitent ensuite une reformulation du produit (ajout de sucre, d’arômes, d’eau, de couleur...) afin d’obtenir un goût acceptable.

Tout comme pour le mot nature, n’y a-t-il pas tromperie à employer le mot vin ? Un vin désalcoolisé est-il encore du vin ?

Un vin nature et sans alcool, est-ce compatible ?

Vous l’aurez compris, sur le plan règlementaire et technique, un vin à la fois nature et sans alcool relève du mythe.

D’un côté, la charte du Vin méthode nature interdit toute technique d’œnologie corrective. De l’autre, produire un vin sans alcool implique nécessairement un procédé de désalcoolisation, donc une intervention lourde sur le produit.

Su le plan idéologique également, les 2 approches semblent difficilement conciliables. Comment les amateurs de vins authentiques pourraient-ils se retrouver dans des vins transformés ? Ne vaut-il pas mieux boire autre chose que du vin lorsqu’on ne souhaite pas consommer d’alcool ?

Des questions qui paraissent simples... mais qui se heurtent à la complexité et aux paradoxes inhérents à la condition humaine.

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