La sophrologie pour mieux appréhender la dégustation du vin

La sophrologie pour mieux appréhender la dégustation du vin

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Installée à Génissac, en région bordelaise, la sophrologue Laurence Palluet met depuis 5 ans cette discipline au service de la dégustation, pour une approche sensorielle renouvelée. Rencontre.

Laurence Palluet, sophorologue - Crédit photo : monphotographecorporate
Laurence Palluet, sophorologue - Crédit photo : monphotographecorporate

Laura Bernaulte : Laurence, tu es sophrologue depuis 7 ans. Peux-tu nous raconter comment la sophrologie s'est-elle imposée à toi ?

Laurence Palluet : Elle ne s'est pas imposée, je suis allée la chercher. J'ai eu une première carrière pendant plus de 20 ans en tant qu'ingénieure en génie climatique et énergétique, puis directrice commerciale dans une entreprise d'équipements techniques du bâtiment. En 2016, autour de la quarantaine, j’ai ressenti un besoin de sens dans ma vie professionnelle. Par du coaching et de l'accompagnement, je me suis mise en quête de choses plus en phase avec ma personnalité. Je me suis posée des questions que je n’avais jamais osé me poser auparavant, prise par ma routine de cadre parisienne, comme : Qu'est-ce que tu aimes faire dans la vie ? Qu'est-ce qui te passionne ? Qu'est-ce que tu as envie de faire en te levant le matin ? A travers ce coaching, des idées sont apparues, et puis, un jour, j'ai entendu parler de la sophrologie. En me renseignant, j’ai réalisé que ça correspondait aux mots que j'évoquais depuis des mois dans ma réflexion, et j'ai décidé de me former à cette discipline en suivant des cours du soir durant deux ans. Aujourd’hui, avec le recul, je me rends compte que dans mes deux carrières, j’avais le même but : apporter du confort aux gens, que ce soit sur leur lieu de travail via la climatisation, le chauffage, le traitement d'air dans ma première activité, ou dans leur vie en général, via la sophrologie désormais.

L.B : Peux-tu rappeler à nos lecteurs en quoi la sophrologie consiste-t-elle ?

L.P : La sophrologie est une méthode psycho-corporelle visant à (re)trouver un équilibre corps-tête-cœur. C'est une technique assez récente, initiée dans les années 1960 par le neuropsychiatre colombien Alfonso Caycedo. Pour la créer, il s’est inspiré de techniques orientales comme la méditation, le bouddhisme, la médecine chinoise, le yoga, ainsi qu’occidentales avec l'hypnose ericksonienne, la méthode Coué ou encore la phénoménologie, un courant philosophique qui invite à regarder la vie et à accueillir les événements avec un regard neuf comme celui d’un enfant qui vient de naître, dénué de tout jugement. Lorsqu’on ne connaît pas encore la sophrologie, on peut croire que c'est une approche un peu perchée. Or, c’est très pragmatique et technique. Par une méthode de respiration, d'accompagnement par la voix, par des exercices de respiration contrôlée, de contraction-relâchement, de visualisation mentale, le sophrologue aide à revenir à un équilibre entre le corps, le mental et l'émotionnel, pour retrouver du bien-être.

L.B : Quelles prestations proposes-tu aujourd’hui en sophrologie ?

L.P : Je propose des séances et consultations individuelles ou des ateliers de groupe dans mon cabinet de Génissac, au cœur de l’Entre-deux-mers, sur des thématiques du bien-être. Depuis 2020, je propose également de la dégustation sensorielle, liant sophrologie et dégustation.

Laurence, sophrologue, en plein séance - Crédit photo : Laurence Palluet
Laurence, sophrologue, en plein séance - Crédit photo : Laurence Palluet

L.B : Comment l’idée de lier sophrologie et vin, via ces dégustations sensorielles, t’est-elle venue ?

L.P : L’idée est née en 2018, lorsque nous avons déménagé de Paris vers la région bordelaise, dans notre nouvelle maison de Génissac, en plein milieu des vignes. Elle s’est ensuite précisée en 2020, lorsque j’ai été sollicitée par Matthieu Potin, futur vainqueur du Concours du meilleur caviste de France 2020, et son collaborateur Julien Lepage, caviste d’argent, pour les accompagner dans leur préparation mentale à la compétition.
Le fait de lier sophrologie et dégustation s’est imposé à ce moment-là. Comme je n'avais pas de légitimité pour leur apprendre à déguster, j'avais besoin de leur proposer quelque chose de différent de ce qu'ils savaient déjà faire. Je cherchais à leur faire lâcher prise sur la dégustation classique, à les faire sortir du mental pour mieux se connecter à leurs émotions, comme en séance de sophrologie classique. Je me suis inspirée de ce que je faisais moi-même en tant que novice de la dégustation de vin, fermer les yeux, prendre le verre en main pour créer une connexion avec les sens, laisser divaguer son corps, son mental, et accueillir les émotions et les images qui émergeaient ainsi.

L.B : Plus précisément, quelle offre as-tu élaborée autour de la sophrologie et du vin ?

L.P : J’organise des dégustations sensorielles, ou j'interviens pour les orchestrer pour d’autres, des propriétés lors d’événements ou des lieux comme la Cité du Vin de Bordeaux, lors d’ateliers de dégustation par exemple. Je propose de la préparation mentale pour les compétiteurs, dont des professionnels du vin, comme les sommeliers ou les cavistes qui préparent des concours. J’anime aussi des formations pour les professionnels du vin, pour leur permettre d’aborder la dégustation autrement, et d'animer eux-mêmes leurs propres dégustations sensorielles.
Je suis ainsi intervenue à plusieurs reprises auprès de l'équipe de sommellerie de la Cité du Vin, qui guide le parcours sensoriel de dégustation Via Sensoria, ainsi qu’auprès d’œnologues. Les œnologues étaient demandeurs, car ils sont très techniques, chimistes, conditionnés mentalement pour aller chercher un défaut spécifique, mais ils avaient aussi envie de découvrir un autre volet de leur métier. Je leur ai proposé d’essayer de trouver un nouveau vocabulaire, complémentaire à celui, technique, qu’ils emploient habituellement, pour acquérir un champ lexical élargi. Cela leur a notamment permis d'être mieux connectés aux vignerons qu’ils conseillent, en trouvant un espace de discussion davantage situé sur l'émotionnel, le sensoriel, l'imagerie, et plus lié à l'affect du vigneron, omniprésent dans la création de son vin.
Enfin, j’ai été contactée par des sophrologues qui ont découvert sur les réseaux sociaux dégustation sensorielle, et j’ai élaboré un programme de formation dédié, pour leur permettre d'animer leurs propres dégustations sensorielles.

Des expériences qui séduisent de plus en plus de professionnels  - Crédit photo : Laurence Palluet
Des expériences qui séduisent de plus en plus de professionnels - Crédit photo : Laurence Palluet

L.B : Concrètement, comment se déroule une séance de dégustation sensorielle ?

L.P : Souvent, je commence par un focus sur la sensorialité. Je trouve intéressant de comprendre que nous n’avons pas seulement 5 sens, mais une trentaine, et qu’il est possible de découvrir d'autres manières de ressentir. Je ne les nomme pas tous, mais en avoir conscience permet aussi de déguster de manière un peu plus ouverte.
Ensuite, vient le temps de la pratique. J’essaie de créer un climat de confiance et de détente, pour que les participants se sentent libres de s'exprimer. Je ne suis pas là pour donner des leçons, mais avant tout pour partager un moment avec eux. J’invite à fermer les yeux et à se laisser guider, lors d’une séquence avec pour fil conducteur les sens et sensations. D’abord, je propose de porter son attention sur les mains, les doigts, le verre, avant de se concentrer sur l'oreille, faire un son, découvrir la vibration dans le liquide, puis se focaliser sur le nez, la bouche, les yeux, même si on ne les ouvre pas.
Ensuite, je raconte une histoire pour faire se projeter dans un paysage en lien avec la boisson. Elle est évidemment différente selon la boisson considérée.
Enfin, vient le temps de la dégustation à proprement parler, en sentant, puis en goûtant la boisson, tout en continuant à rester concentré sur ses sensations.

Une sophrologue qui revisite les codes de la dégustation pour un moment unique - Crédit photo @monphotographecorporate
Une sophrologue qui revisite les codes de la dégustation pour un moment unique - Crédit photo @monphotographecorporate

L.B : Suite aux nombreuses séances de dégustations sensorielles que tu as pu dispenser, quels ont été les retours des participants ?

L.P : Pour beaucoup, c'est de la découverte. Ne serait-ce que le fait de parvenir à se détendre pendant la dégustation, c’est nouveau pour eux. Pour certains, c'est de l'émerveillement, parce qu'ils plongent dans un monde intérieur qu'ils avaient peut-être un peu laissé de côté. D’autres ont même la curiosité d'aller explorer un peu plus loin, en renouvelant l'expérience.

L.B : Si nos lecteurs veulent s’entraîner chez eux à la dégustation sensorielle, comment peuvent-ils procéder ?

L.P : Je leur proposerais de prendre un moment pour eux, confortablement installés dans un canapé ou sur une chaise, de commencer par se détendre et se relâcher. Ensuite, de s'autoriser à fermer les yeux, à respirer profondément, puis d’essayer de se connecter indépendamment à chacun de leurs sens. Penser à leurs mains, au contact du verre sur leurs doigts, aux oreilles aussi, qui peuvent donner beaucoup d’informations, se toucher le nez, sentir l'air dans les narines, penser au bulbe olfactif, essayer d'imaginer qu'on est surpuissants et qu'on va pouvoir stimuler au maximum toutes les papilles. Et puis porter le verre au nez, prendre le temps de laisser les effluves arriver et laisser les images émerger. Ensuite, attendre, ne pas ouvrir les yeux, se concentrer sur la bouche, découvrir le liquide en bouche, imaginer toutes les papilles et nos capteurs tactiles qui peuvent le percevoir, sentir le liquide qui chemine dans la bouche puis dans la gorge, qui rentre dans le corps. Continuer à prendre le temps, et surtout, faire confiance à ses capacités sensorielles, sans se laisser influencer par des idées reçues.

L.B : As-tu des projets ou des envies pour continuer à développer ce créneau de la sophrologie et du vin ?

L.P : Je suis déjà ravie des opportunités que la sophrologie m’a permis d’avoir et des rencontres qu’elle m’a permis de faire. J'ai déjà travaillé avec le sommelier David Biraud, qui a représenté la France plusieurs fois au Concours de meilleur sommelier du monde. Maintenant, en vue de l’édition 2026, j’aimerais bien préparer mentalement notre représentante française, Pascaline Lepeltier. Pascaline, si tu nous lis !

Lisez aussi notre article sur la dégustation et l'Intelligence Artificielle pour découvrir de nouvelles manière de déguster.

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